N°de pourvoi : 09-14505
Publié au bulletin

REJET

M. Charruault, président
Mme Marais, conseiller rapporteur
M. Mellottée, avocat général
Me Foussard, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en ses trois premières branches :

Attendu que revendiquant la titularité des droits d’auteur sur deux modèles de jupes qu’elle commercialise sous son nom, et prétendant que ces modèles avaient été créés par sa styliste, Mme X., et fabriqués, sur les instructions de celle-ci, en Chine, par la société Jiangsu Soho international, la société Anitsa a, par acte du 9 février 2006, assigné la société Fashion B. Air, en contrefaçon et en concurrence déloyale, lui reprochant d’avoir mis sur le marché des modèles reproduisant les caractéristiques des siens ;

Attendu que la société Anitsa et Mme X. reprochent à l’arrêt attaqué (Paris, 16 janvier 2009) de les avoir déclarées irrecevables à agir en contrefaçon et d’avoir rejeté leurs demandes alors, selon le moyen :

1°/ que l’entreprise qui exploite une œuvre est présumée être titulaire des droits d’auteur sur cette œuvre ; qu’en écartant la présomption, sans constater que la société Anitsa n’exploitait pas les modèles, les juges du fond ont violé les articles L. 111-1 et L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle ;

2°/ que la seule allégation du défendeur qu’il se soit approvisionné chez le même fournisseur ou qu’il ait été en possession de marchandises provenant du même fournisseur, ne pouvait à elle seule, dès lors qu’il s’agissait d’une simple allégation, faire obstacle à la présomption liée à l’exploitation commerciale de l’œuvre et qu’en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles L. 111-1 et L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle ;

3°/ qu’à supposer même qu’ils n’aient pas été en présence d’une simple allégation mais d’un fait établi, la seule possession par la société Fashion B. Air de modèles en provenance d’un fournisseur commun ne pouvait à elle seule faire échec à la présomption qu’invoquait la société Anitsa en tant qu’elle était fondée sur l’exploitation de l’œuvre sauf bien entendu à la société Fashion B. Air, le cas échéant, à renverser la présomption par la preuve que la société Anitsa n’était pas titulaire du droit ; que pour avoir statué comme ils l’ont fait, sur la base d’un motif inopérant, les juges du fond ont de nouveau violé les articles L. 111-1 et L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que la présomption de la titularité des droits d’exploitation dont peut se prévaloir à l’égard des tiers poursuivis en contrefaçon la personne qui commercialise sous son nom un objet protégé par le droit d’auteur, suppose, pour être utilement invoquée, que soit rapportée la preuve d’actes d’exploitation ; qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que les modèles en cause ont été acquis, auprès du même fabricant chinois et à la même époque, par les deux sociétés françaises qui les ont commercialisés concomitamment sur le marché français, sans qu’il soit justifié par l’une d’entre elles d’instructions précises adressées à la société chinoise pour leur fabrication ; que la cour d’appel a pu en déduire que, dans de telles circonstances, la société Anitsa ne pouvait se prévaloir d’actes d’exploitation propres à justifier l’application de la présomption de titularité des droits ; que les griefs ne sont pas fondés ;

Et attendu que la cassation sollicitée par voie de conséquence par la quatrième branche est dès lors sans objet ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi,

Condamne Mme X. et les autres demandeurs aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille onze.