N° de pourvoi : 99-15284
Publié au bulletin

CASSATION PARTIELLE

Président : M. Lemontey
Rapporteur : M. Ancel
Avocat général : M. Sainte-Rose
Avocats : la SCP Piwnica et Molinié, la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, M. Choucroy

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Attendu que la société Editions Phébus a édité et la société des Editions du Seuil distribué en France une traduction sous le titre “Le Bal des maudits” de l’oeuvre d’Irwin X. intitulée “The Young Lions“ ;

Attendu que l’arrêt attaqué a condamné les Editions Phébus pour contrefaçon, à la demande de M. Adam X., héritier de l’auteur et titulaire du droit moral, mais a débouté M. X. de sa demande envers les Editions du Seuil, jugées de bonne foi, et a dit que M. X. n’avait commis aucune faute en faisant procéder à une saisie conservatoire sur les comptes bancaires des Editions du Seuil ;

Sur les deux moyens du pourvoi principal de la société des Editions Phébus, pris en leurs diverses branches :

Attendu que, procédant à l’analyse de la correspondance échangée entre les Editions Phébus et l’agence Tessa Sayle, à qui avait été demandée l’autorisation de publication, la cour d’appel a souverainement retenu qu’il en ressortait que cette agence ne se reconnaissait pas le pouvoir d’engager les héritiers de l’auteur, de sorte qu’elle ne pouvait paraître que comme un intermédiaire dépourvu du pouvoir de conclure un contrat d’édition, d’où les juges du second degré ont pu déduire que cette agence ne pouvait être considérée comme le mandataire apparent des ayants droit de l’auteur ; que la cour d’appel a ainsi, sans dénaturation, légalement justifié sa décision sur ce point ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches, du pourvoi incident des éditions du Seuil contre M. X. :

Attendu qu’ayant à apprécier le caractère fautif, ou non, de la procédure de saisie conservatoire dirigée par M. X. contre les Editions du Seuil, la cour d’appel a pu décider que M. X. n’avait pas commis de faute dans les circonstances de la cause, sans avoir à examiner le bien-fondé de cette mesure au regard de la loi du 9 juillet 1999, visée par le moyen, qui ne peut donc être accueilli ;

Mais sur la première branche du premier moyen du pourvoi incident de M. X., dirigé contre les éditions du Seuil :

Vu l’article L. 122-4 du Code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que la contrefaçon est caractérisée, indépendamment de toute faute ou mauvaise foi, par la reproduction, la représentation ou l’exploitation d’une oeuvre de l’esprit en violation des droits de propriété intellectuelle qui y sont attachés ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. Adam X. contre les Editions du Seuil, l’arrêt attaqué énonce que cet éditeur s’est borné à distribuer, de bonne foi, l’ouvrage litigieux ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que les Editions du Seuil avaient exploité l’oeuvre contrefaisante, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi incident :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a rejeté la demande dirigée par M. X. contre les Editions du Seuil, l’arrêt rendu le 2 mars 1999, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée.